- Pierre de Plater
Mandat de vente (entremise): le mandant peut changer d’avis et refuser de vendre
Civ. 1ère, 15 juin 2022, n° 20-22.047
On lit fréquemment que la question primordiale est celle de l’exclusivité du mandat. Si cet aspect à un intérêt au regard d'autres professionnels qui pourraient être mandatés par le même vendeur, il en a peu au regard de la conclusion de la vente en elle-même.
Par un arrêt de cassation du 15 juin 2022, la première chambre rappelle que le mandat d’entremise n’empêche pas le vendeur (mandant) de refuser de vendre au candidat acquéreur présenté par l’agence.
L’on s’interrogera à ce titre, sur la qualification de « mandat » d’entremise, s’agissant finalement d’une prestation de recherche d’acquéreur aux prix et conditions.
Dans ce contexte, si le mandant refuse de ratifier la vente avec le candidat ainsi présenté par l’agence, le mandataire n’est pas susceptible de percevoir de rémunération, qu’il s’agisse des « frais d’agence » (pourcentage ou forfait) dus au titre de la vente - puisqu’elle ne s’est pas réalisée - ou d’une indemnité/pénalité pour refus de réalisation - car le refus du mandant n’est pas fautif.
Ce n’est pas la première fois que les juridictions d’appel et que la Cour de cassation se prononcent en ce sens.
Aussi, il conviendrait, pour résorber cette difficulté, d’insérer aux mandats une clause de représentation. A défaut, au-delà du fait que la vente est une opération dite complexe et qu’elle ne se limite pas toujours à appréhender la chose et le prix de manière générique, la présentation du candidat par l’agence ne vaudra pas engagement du vendeur, qui ne sera pas contraint de la conclure.
Ainsi qu’a pu le juger la cour d’appel de Toulouse dans un arrêt du 25 mai 2020 (n°17/03683): « le premier juge a exactement considéré que le mandat donné à un agent immobilier lui confère seulement une mission d’entremise et n’a pas pour effet de le substituer à son mandant pour la réalisation de l’opération envisagée ».
Il conviendra néanmoins d’être particulièrement attentif à la manière dont le mandat est rédigé, pour échapper à la simple « entremise ».
Par exemple, au terme d’un arrêt rendu par la Cour d’appel d’Agen le 22 juin 2022 (n°21/00867), un mandat de vente précisait que l’agence immobilière « avait pouvoir » pour « établir tous actes sous signature privée au prix, charges et conditions des présentes et recueillir la signature de l’acquéreur ». Pour les magistrats : « cette clause qui se limite à donner mandant à l’agence immobilière d’établir des actes et de recueillir la signature de M[H.] (ndlr : l'acquéreur), ne lui conférait pas le pouvoir de représenter […] ».
P. de Plater
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